lundi 31 décembre 2012

Bonne arrivée 2013


Bonjour mon ami j’espère que tu auras la force de supporter les épreuves dans ce pays là hein parce qu’ici les gens aiment les extrêmes. Les « à peu près » leur donne des boutons et ça je l’ai compris très tôt. Je ne me souviens plus exactement de tous les évènements qui se sont produits mais je vais essayer de te briefer un peu sur la situation. 

Tu connais leur équipe nationale de Football ? Je crois qu’on les appelle Les Eléphants. Eh bien ! Ils leur ont donné un sacré goumin en ma présence. Ils les ont longtemps fait espérer avant de leur donner un coup de massue au cœur avec la défaite à la finale; mais bon découragement n’est pas ivoirien alors bonne chance à toi car c’est pendant ton règne qu’il y aura la prochaine coupe d’Afrique des nations. Il y aussi eu l’affaire Davido, artiste d’un pays voisin qui a osé ne pas se présenter à son concert alors qu’il était tant attendu par ses fans ivoiriens mais bon passons. Tout récemment, les ivoiriens se sont essayés à Kora qui malheureusement je peux te dire a été un échec sans rentrer dans les détails.

Toutefois collègue 2013 ne te méprends pas hein, il y a aussi eu du positif sous mon règne. Malgré leur défaite à la CAN, les ivoiriens ont découvert qu’ils avaient un très bon gardien en la personne de Copa Barry qui n’a pas encaissé un seul but durant toute la compétition. Davido a bien fait le malin sur eux mais ils visaient plus loin car c’est la Star internationale Chris Brown qui a été accueillit récemment dans leur pays avec les beaux jumeaux du groupe P Square. Arafat DJ peu importe ce que je pense de sa musique a représenté le pays en recevant à la fois le prix du meilleur artiste masculin de l'Afrique de l'Ouest et celui de l'Afrique toute entière.

Niveau politique? Euh collègue pardon leur affaire bizarre là ne mettons pas notre bouche dedans ce qui est sûr moi 2012 j'ai fini mon temps hein donc mon travail est terminé. Bonne arrivée à toi et arme toi de courage face à cette Côte d'Ivoire pleine de rebondissements.

Ton ex-collègue 2012

vendredi 14 décembre 2012

Pensez-y

Hier soir je terminais enfin mon semestre de septembre et par conséquent je rentrais à la maison pour un repos bien mérité. J'habite Yopougon alors sur le chemin du retour avec mon grand frère, nous étions arrêtés au feu de bel air pour ceux qui connaissent. Je regardais les voitures alignées sur mon côté lorsque j'ai aperçu un jeune homme en kaki assis à la fenêtre du bus. J'ai pensé, "oh mais les élèves aiment le danger" et toutes sortes d'idées m'ont traversée l'esprit. Certaines personnes dans le bus tapaient des mains sur le bus à travers la fenêtres (J'espère que vous percevez l'image). Je me disais qu'ils essayaient de lui dire de rentrer et s'arrêter convenablement dans le bus mais ce n'est que quelque secondes plus tard que j'ai compris ce qui se passait.

Nos bus sont tellement remplis que les personnes aux maladies respiratoires devraient les éviter. Malheureusement, il ne suffit pas de vouloir pour pouvoir. Nombreuses sont les personnes qui n'ont pas les moyens pour s'épargner cette souffrance quotidienne.

Dans le bus numéro 27 que j'ai aperçu hier, une jeune fille semblait piquer une crise d'asthme? d'épilepsie? Je ne saurais le dire mais en tout cas lorsque je l'ai vue elle n'était pas dans son état normal. Ce jeune homme à la vitre était tout simplement descendu pour que d'autres à l'intérieur la fassent sortir par la fenêtre et qu'elle puisse prendre de l'air. D'autres lycéens sont aussi descendus pour l'aider. Je ne sais pas si cette jeune fille est la soeur de l'un d'entre eux où même s'il la connaissent mais en tout cas ils ont su qu'ils devaient faire quelque chose parce qu'apparemment le chauffeur ne daignait pas ouvrir les portières. On traite souvent les jeunes dans le bus de tout et n'importe quoi, certes ce ne sont pas des anges mais sans l'aide de ces garçons, Dieu seul sait si cette petite aurait repris son souffle.

Agents de Sotra ayez pitié de vos clients, ce ne sont pas des bovins que vous transportez et même les animaux ont droits à du respect. Les autorités devraient sérieusement penser à cette histoire de bus, on en parle toujours mais à quand un changement réel? Pensez-y.

lundi 3 décembre 2012

La brebis


Il s'appelait Stéphane Guirou et nous nous sommes rencontrés grâce à twitter. Je le suivais, il m’a suivit en retour et tout est parti de là. Je me souviens que je le trouvais drôle et il disait que je faisais plus mature pour mon âge. Au début on ne se parlait que par tweets interposés, puis un jour nous sommes allés en DM.

Nous sommes par la suite devenus amis sur facebook. Il aimait mes photos et je commentais les siennes jusqu’au jour où je lui ai passé mon numéro de téléphone en inbox. J’ai tout de suite apprécié sa voix, suave et douce mais assez grave pour me faire fondre. Je savais déjà à quoi il ressemblait grâce à ses photos sur twitter et facebook. C’est vrai que les photos sont très retouchées maintenant avec les nombreux logiciels à notre disposition, mais un homme avec une voix pareille ne pouvait pas ressembler à king kong. Il y a quand même des exceptions mais je ne m’étais pas trompée sur son cas.

Un après midi il m’invita au château de glace à Angré pour qu’on puisse enfin se rencontrer. Il devait mesurer dans les 1 m 80, de teint clair, une dentition parfaite et portait une boucle à l’oreille gauche. Je n’aime pas ce genre de garçon avec cet ornement que je juge typiquement féminin mais bon, je ne le voyais pas autrement qu’en ami. Nous avons discuté de tout et de rien car à vrai dire je savais déjà presque tout sur lui à travers nos messages sur facebook. Il était féru d’informatique, de cinéma, mais était aussi un adepte des boîtes de nuit, maquis et autres plaisirs des jeunes de babi. Il s’intéressait à moi disait-il mais je ne suis pas attirée par les hommes avec ce petit côté voyou, notre amitié était largement suffisante pour moi.

J’aimais son côté rêveur, il ne se prenait pas vraiment au sérieux. Je le voyais comme une brebis égarée que je devais guider. Pas que j’étais une sorte de guide spirituel mais cela me désolait de le voir s’adonner à toutes sortes de vices allant de l’alcool à la drogue. Toutefois, il n’était pas le genre de drogués que l’on imagine, sales, qui sentent mauvais et se promènent dans les rues comme des zombies. Lui il ne se droguait que lorsqu’il était dans un show avec ses amis, car disait-il il suivait la tendance.
Je voyais bien qu’il finirait par sombrer totalement dans la perdition car, il ne partait plus que très rarement à ses cours d’informatique alors que sa mère désormais veuve se donnait tant de mal pour payer ses études.

Ce matin il m’a donnée rendez vous chez lui pour m’expliquer un problème. Ces temps-ci il me fait très souvent appel pour que je lui donne des conseils mais j’ai l’impression que tout ce que je lui dis rentre par une oreille et sort par l’autre. J’ai bien essayé de lui faire comprendre qu’il se détruisait dans ce monde plein de débauche mais il ne m’écoutait pas. Ce matin pendant qu’il me parlait de ses soucis avec sa mère qui n’en pouvait plus de le voir gâcher son avenir, la sonnerie de son téléphone portable retentit.

« Allo ! Oui Bosco, c’est comment ? Non non ne t’inquiète pas je serai là avec le colis comme promis. Oui oui à tout à l’heure.
- Encore dans tes magouilles ? Lui demandais-je. Quand est-ce que tu comprendras que l’école est la meilleure voie de réussite pour toi ? Et tu refuses toujours de me dire ce que tu fais de tes journées j’aimerais comprendre.

- Olivia tu aimes trop ça, toujours avec tes reproches. Je fais juste des petites affaires, ne te préoccupe pas de moi je sais ce que je fais.

- C’est toi qui m’a appelée ici je te signale, parce que je suis ton amie. Je ne peux pas te voir en train de faire des bêtises et le tolérer donc si cela ne te plaît pas désolé.

- Ne te fâche pas chérie. A propos tu pourrais m’accompagner chez mon pote vers 16h pour que je lui donne une commission ?

- Comme tu veux.

Nous avons passé la journée ensemble jusqu’à 15h30 lorsqu’il est rentré chercher un sachet noir dans la chambre pour qu’on se rende chez son ami Bosco. Sur le trajet il me paraissait silencieux, lui qui d’habitude aime raconter des blagues pas toujours marrantes mais qui détendent l’atmosphère. Je l’observais du coin de l’œil sans pouvoir prononcer le moindre mot. On se connait depuis plus de huit mois maintenant mais ces dernières semaines il me semble préoccuper mais refuse de me dire ce qui le tracasse.

Le taxi nous déposa devant un duplex à Marcory remblai. Je ne connaissais pas son ami mais je l’avais quand même accompagné. Dans la cour plusieurs jeunes s’adonnaient à différents jeux, des dames, aux scrabbles en passant aux cartes pendant que d’autres s’affairaient sur des ordinateurs portables.

« Phany 8000 giga, tu es enfin arrivé, viens le gars nous attend dans la chambre.

- Viens Olivia, suis-moi.

- Où tu m’emmènes encore toi là, ne me mets pas dans un de tes faux coups là hein !

- Non viens, je ne veux pas te laisser ici vu que ne connais personne.

La chambre où nous entrâmes était mal éclairée et dégageait une odeur nauséabonde, j’hésitais encore à entrer quand le fameux Bosco m’y poussa tout d’un coup.

- Bonsoir Ahouli, lança Bosco à un personnage que j’avais peine à identifier. Voilà mon ami avec sa brebis on peut tout régler maintenant.

- Brebis ? chuchotais-je à Stéphane qui semblait ne pas prêter attention à mes coups de pression sur sa main.

- Bon je vais t’expliquer dit-il de manière brute. De toutes les façons je ne peux plus reculer. Tu sais l'argent que je gaspille dans les boîtes de nuit, ça ne tombe pas du ciel, mais je ne suis pas un braqueur, ou un dealer. Je suis un brouteur et actuellement ça ne va pas très bien dans mes affaires. Avant je m’arrangeais, avec des sacrifices d’animaux mais là il me faut plus pour devenir riche.

- Qu’est ce que cela signifie ?

- J'ai besoin à présent d'un sacrifice humain et je vais t’offrir en holocauste car…..
Je n’entendais plus rien à ce qui suivit en voyant le couteau qui sortait du sachet noir, je crois que je suis tombée dans les pommes.

 Babi: Abidjan

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mercredi 21 novembre 2012

EN UN INSTANT



J’aurais bien aimé passer la journée d’hier avec mon petit ami Cédric ou mes potes mais ma famille m’a prise en otage de 6h à 22h. Maman m’a forcée à passer la matinée avec mon enquiquineuse de petite sœur. Ah Aurelia ! Je vous assure que j’ai parfois envie de l’échanger contre un paquet de chips au supermarché tellement elle est emmerdante. Elle passe tout son temps à rapporter mes moindres faits et gestes aux parents. Je me demande souvent si j’étais aussi agaçante à huit ans.


A midi mon grand frère m’a invitée à son domicile pour le déjeuner. Mon frère je l’aime beaucoup mais franchement depuis qu’il est marié, il est insupportable. Je dirais que son épouse le mène par le bout du nez, mais personne à part moi ne semble s’en préoccuper dans cette famille. Comme d’habitude, il a essayé de jouer le rôle du méchant aîné alors que dans sa période de célibat il était plutôt un ami, un confident pour moi. Lorsque je lui rappelle qu’il a changé, il me dit qu’il a juste mûri et qu’il espère que j’en fasse de même.


Vers 15h maman est passée me chercher chez Roland pour le salon de coiffure. C’était le moment le plus agréable de la journée jusqu’à ce qu’elle commence avec ses nombreux conseils. Elle me parle comme on le ferait avec une gamine : ne fais pas ci, ne fais pas ça. Je pars juste en France pour mes études, ce n’est pas la fin du monde. Maman a toujours été très attentionnée envers moi mais parfois elle fait trop sa mère poule. J’ai 19 ans, je sais ce qui est bien pour moi, et bien entendu ce qui ne l’est pas.


Papa quant à lui, on ne le voit jamais à la maison mais hier comme par enchantement il a décidé de décrocher un peu de son boulot et a passé une heure avec moi. Une heure durant laquelle il n’a pas cessé de me souler avec mes soi disant mauvaises habitudes. « Tu es trop paresseuse, et tu passes tout ton temps dehors. Mon ami a accepté de t’héberger chez lui alors ne pars pas me faire honte là bas ». A croire que je suis totalement inconsciente, et que je ne connais pas l’objectif de ce voyage. C’est vrai que j’ai en tête de m’amuser à fond à Paris mais je ne compte pas oublier ce pour quoi je m’y rends.


Ce matin lorsque l’avion a décollé je me suis sentie légère, et j’attendais déjà beaucoup de cette nouvelle aventure. Vivre loin de ses parents, quel adolescent n’en rêve pas ? En tout cas moi j’ai longtemps attendu ce jour où je partirais vers de nouveaux horizons. En parlant d’horizon, c’est fou comme en un instant  j’ai pu penser à cette dernière journée. 

Depuis quelques instants le pilote de l’avion a perdu le contrôle de l’engin. Je voulais découvrir de nouveaux horizons mais l’océan Atlantique est bien trop vaste pour ce que je désirais. Je voudrais tant revivre cette journée, des dizaines, des centaines et même des milliers de fois. J’aimerais que ma sœur et mon frère m’embêtent, que papa et maman me gavent de conseils. J’aimerais ne pas être dans cet avion qui à présent fonce dans cette étendue d’eau salée; j’aimerais prendre le temps d’apprécier ma vie de famille. J’aimerais juste ne pas revivre cette journée en un seul instant, mais pendant encore plusieurs années.

jeudi 8 novembre 2012

JE LE PERDS


Yann est parti ce matin avec toutes ses affaires. Après plusieurs avertissements, il a décidé de mettre sa menace à exécution. Il dit qu’il en a marre que je fouille dans ses affaires, que je contrôle toutes ses sorties, ses fréquentations. J’essaie de me faire à l’idée qu’il change mais c’est difficile. Dieu seul sait combien de sacrifices j’ai dû faire pour lui. J’ai été rejetée par ma famille, mes amis, j’ai arrêté l’école et que sais-je encore ? Non je ne peux pas accepter qu’il parte.


J’ai commencé à m’inquiéter en Janvier lorsqu’il est rentré à la maison avec quelques amis, exactement deux filles et trois garçons. Croyez-moi, n’importe qui aurait tiqué en voyant ces individus. Lorsque je lui ai parlé de ses fréquentations, il m’a répondu qu’il était assez grand pour faire le tri dans ses amis. Que pouvais-je répondre ? Je n’ai jamais su élever la voix face à lui. Pas par crainte de sa personne, non je n’ai jamais eu peur de lui. Si je ne le contredisais que très rarement c’est juste parce que j’avais peur de le frustrer, et de le perdre par la suite. Au final, tous mes efforts n’auront surement servis à rien.

J’ai cédé à plusieurs de ses caprices mais celui là en est de trop. Je ne m’inquiète pas pour les commérages du voisinage. Les gens critiqueront toujours que tu agisses bien ou mal, alors qu’ils attisent le feu si cela peut soulager leurs propres douleurs. Je ne me soucie même pas de ce que dira ma propre famille, personne n’a jamais été là pour moi alors leur venin ne m’atteindra pas. J’ai vécu seize ans toute seule avec Yann, alors qui pourrait me donner des leçons aujourd’hui sur mon attitude vis-à-vis de lui ?

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Karl m’a abandonnée lorsque j’ai contracté cette grossesse. Il savait très bien qu’il était le seul homme de ma vie mais il m’a quand même accusée d’infidélité. Maman avait donc raison, il ne faut pas avoir pleinement confiance en un homme. Karl était l’homme de ma vie mais il me démontra que je n’étais pas l’unique femme de la sienne. Toutes les belles paroles que je recevais ont disparu le jour même où il apprit mon état. Je le voyais s’éloigner lorsque je lui offris ce que j’avais de plus cher, ma virginité, mais j’essayais de me convaincre que ce n’était que passager. Sa réaction après l’annonce de ma grossesse mit fin à toutes mes illusions. Par sa faute, je fus rejetée par tous avec cette grossesse qualifiée de non-désirée.

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Ah que je l’aime, de tout mon cœur, de toute mon âme et de tout mon esprit. Pendant les neufs mois où il logeait en mon sein, je n’ai cessé de développer un amour fort et grand pour celui qui se prénomme aujourd’hui Yann. Etant toute seule pour m’occuper de lui et le voir grandir, j’ai tenté de lui apporter à la fois l’amour d’une mère, d’un père, d’une tante, d’une grand-mère, bref de tous les proches parents que l’on pourrait énoncer. A sa naissance je fus la femme la plus heureuse du monde. J’étais encore une petite fille en vrai, mais cet enfant m’a donné la chance de montrer au monde entier que j’étais une femme forte. J’ai tenu bon pendant seize longues années durant lesquelles je m’attelais à subvenir à tous ses caprices.

Ma principale inquiétude est de savoir où il logera, comment il subviendra à ses besoins, avec qui sera-t-il ? J’ai dans le cœur la même peine que toute mère aurait face au départ prématuré de son fils du cocon familial. J’aimerais bien le retenir, lui dire que j’accepterai toutes ses conditions pour qu’il reste mais c’est au dessus de mes forces. Je l’ai aimé plus que ma propre vie, et je pourrais donner ma vie pour lui mais que dirais-je à Dieu ? Aurais-je la force de me tenir devant mon Seigneur et reconnaître que je l'ai laissé agir comme bon lui semblait ? 

Vous me direz que c’est mon fils et que je dois l’accepter tel qu’il est mais désolé, tant qu’il vivra sous mon toit je ferai tout pour lui faire entendre raison. Il est parti pour je ne sais où, mais quand je le retrouverai, je vous promets que je mettrai tous les moyens à ma disposition pour que mon fils redevienne "normal". Toutefois que feriez-vous à ma place en découvrant que votre unique garçon est un homosexuel ?

jeudi 1 novembre 2012

MARIAGE DE REVE



Il était 2h du matin quand Martin se réveilla en sursaut suite à un cinquième cauchemar. Il était censé se marier dans quelques heures et avait besoin d’un repos réparateur pour toutes ses semaines d’intenses préparatifs. Sabrine, sa compagne depuis dix ans maintenant semblait dormir comme un bébé. Cinq fois qu’il faisait le même cauchemar, cinq fois qu’il se réveillait en sueur alors que Sab quant à elle continuait son idylle avec Morphée, ignorant les tracas de son conjoint.

Le mariage devait avoir lieu à 8h30 mais dès 7h, Martin était déjà en route pour la maison de Gérard son témoin. Il n’avait pas réussit à se rendormir et il n’avait pas envie d’expliquer ses angoisses à Sabrine alors quitter la maison de bonne heure lui avait semblé être une meilleure idée. Ce mariage se devait d’être parfait, vu tous les efforts qu’il avait fournit pour son organisation.       
                                                
Tous ces tracas pour se plier aux exigences de sa dulcinée. Ah ces femmes ! Toujours à vouloir faire mieux que leurs amies. Il n’était pas question qu’un mariage fut plus beau que le leur, il ne pouvait pas se le permettre. Que ne ferait-il pas pour la combler ? Il avait tenu à ce mariage malgré l’opposition de tous les membres de sa famille hormis son cousin Gérard. Certains de ses amis étaient également contre cette union mais il n'en avait cure.

Gérard est considéré comme le raté de la famille car son faible niveau d’études lui a fermé les portes à la réussite sociale. Divorcé avec deux enfants à sa charge, il est obligé de quémander auprès de ses frères et cousins pour la survie de sa progéniture. S’il était à même d’assurer sa pitance quotidienne, il se serait sans doute opposer à ce mariage comme toute la famille, mais il avait besoin de l’argent que lui donnait Martin chaque fin du mois.

Chez son cousin et témoin, les pensées de Martin s’envolèrent vers la future épouse. Il aimerait bien la voir une dernière fois avant qu’ils ne se disent oui mais les superstitieux disent que cela porte malheur. Martin n’en avait que faire de toutes ces superstitions mais, sa future épouse, elle y croyait fermement alors il s’y pliait aussi. Ce mariage lui avait coûté la peau des fesses mais tout ça serait bientôt derrière eux. Il avait suffisamment patienté pour lui offrir le mariage de ses rêves et il avait hâte que tout se termine.

A 8h, Martin était déjà à l’hôtel de ville du plateau dans la plus belle Mercedes garée sur le parking de l’établissement. Trente minutes plus tard la mariée était aussi présente mais avec les retards habituels, la cérémonie commença trente minutes plus tard. Le bla bla quotidien du maire, les plaisanteries souvent déplacées, puis le moment du consentement mutuel arriva.

« Monsieur Koné Martin, voulez vous prendre pour épouse mademoiselle Kané Fabienne ?»

Il avait attendu plus de deux ans pour qu’on lui pose cette question. Il avait passé deux ans à économiser pour offrir à sa collègue le mariage dont elle rêvait, afin qu’elle puisse enfin avoir la preuve de son amour pour elle. C’est vrai qu’il ferait du mal à Sabrine mais elle s’en remettrait bien un jour ou l’autre. C’était le jour de son jour, et rien ne pouvait l’empêcher de consacrer ces années de dur labeur. Enfin, il avait tout prévu sauf ça.

« Papa c’est vraiment toi qui te maries ?» La voix de Stéphanie, sa fille avait retentit dans la salle. 

Les regards se tournaient à la fois vers le père et les deux enfants âgés de dix et sept ans. Stéphanie et son frère Ange avaient appris par leurs amis que leur père se mariait aujourd’hui. Ils n’y croyaient pas mais un carton d’anniversaire apporté à l’école par Joel les avait convaincus. En tenue d’école, ils s’étaient échappés des cours pour voir de leurs propres yeux, leur père se lier à une autre femme. Leur mère n’était pas là, elle n’était pas au courant de ce qui se tramait dans son dos. 
Martin pouvait se retourner et dire « OUI » comme il l’avait si bien préparé mais pousserait-il l’ignominie jusqu’à dire « Oui » en tournant le dos à ses enfants en pleurs ?

Le rêve ou plutôt le cauchemar se termine à chaque fois sur ce dilemme. Pour la sixième fois, Martin se réveille avec la même anxiété. Doit-il épouser Fabienne, ou revenir à la raison et rester avec la femme couchée auprès de lui, qui a partagé sa galère pendant sept années et lui a donné deux magnifiques enfants ?

vendredi 26 octobre 2012

BEAUTE ILLUSOIRE

Je me suis toujours vanté d’avoir épousé la plus belle femme au monde. La beauté est relative mais celle de Rigo met tout le monde d’accord. D’ailleurs, comment ses parents ont pu donner Rigobertine comme prénom à une aussi belle princesse. La première fois qu’elle m'a dit comment elle s'appelait, j’ai cru à une farce ; mais non c'est bien son unique prénom. En même temps, ses parents villageois n’ont pas vraiment de goût hormis pour la procréation. Tous leurs 5 enfants, filles comme garçons sont des pures merveilles, toutefois, Rigo demeure la plus belle de la famille.

Trêve de bavardages, j’ai rencontré Rigo il y a cinq ans lors de funérailles dans mon village. J’ai longtemps hésité avant d’assister à l’enterrement de cet oncle plus avare qu’Harpagon lui-même.  Cependant, mon voyage a été récompensé par la découverte de cette perle rare. Cadre, élégant, mais surtout citadin, je n’ai pas eu de mal à la conquérir. Je me considère chanceux qu’un autre énergumène ne soit passé avant moi et n’ait volé le cœur de ma dulcinée. Quoi qu’il en soit, Rigo m’appartient et je n’aime pas qu’on pose le regard sur elle.

Pour épouser mon amour je n’ai pas eu à faire de grandes dépenses car sa famille a voulu quelque chose de simple. Je n’ai plus aucun proche parent après mon avare d’oncle et sa famille a tenu à ce que le mariage coutumier se fasse dans la stricte intimité. Cela faisait des années que je n’avais pas été au village alors j’ai bien aimé l’idée d’une cérémonie sans tapage. Seul mon meilleur ami Kévin m’a accompagné pour me servir de témoin. Un adjoint au maire a effectué le déplacement  à mon domicile en ville pour la cérémonie civile et j’étais officiellement l’homme le plus heureux de la planète.

En plus d’être belle, Rigo est gentille, douce, aimante, soumise, accueillante. Je ne lui ai trouvé aucun défaut durant toutes ces cinq années passées ensemble. La seule chose qui me tracassait était l’absence de rires d’enfants dans notre grande villa. Cinq ans, sans la moindre grossesse, le moindre retard dans les menstrues, rien, absolument rien. Pourtant nos examens ne révèlent aucune anormalité chez l’un comme chez l’autre.

Hier Kévin m’a appelé au milieu de nuit, disant qu’il a quelque chose de très important à me raconter. J’étais tellement exténué par ma journée de boulot que je n’ai rien compris à ce qu’il racontait. Ce matin j’ai découvert une lettre de Rigo à mon chevet.
« Roger je t’abandonne parce que Kévin va détruire ce que j’ai mis cinq ans à construire. Je t’ai aimé et je t’aimerai surement encore mais il est mieux pour moi que je parte. Je savais que cela arriverait un jour car ma beauté est une malédiction pour moi. Adieu »

Kévin a donc osé faire ça, courtiser ma femme ? Ma femme ? Il était pourtant plus qu’un ami, un frère. Il entra dans le salon, son journal à la main comme d’habitude. « Roger je n’arrive toujours pas à croire à ce qui nous ai t’arrivé.

           -    Moi non plus mais bon, qui ne serait pas tenté par cette beauté ? Je suis déçu mais je surmonterai ma douleur. Toi par contre tu n’auras pas le temps de sentir la tienne.
PAN ! le révolver que j’ai acheté avec Kévin il y a de cela quelques années a servi a tué son ancien propriétaire. Il eut juste le temps de me montrer l’une des pages du journal où figurait la photo de Rigobertine et de toute sa famille. 

En commentaire j’ai pu lire : « Morts il y a plus de dix ans, les membres de la famille Tapé continuent de charmer les vivants grâce à leurs beautés légendaires. Ils se marient, ne font pas d’enfants puis disparaissent  quand leur secret est découvert, faisant sombrer leurs conjoints dans la folie. Ils se vengent ainsi, de plusieurs trahisons amoureuses. Leur beauté leur aurait joué un sale tour ».


lundi 22 octobre 2012

POUR TINO !


Si tu habites Yopougon tu connais surement Josée la star. Josée la plus belle fille d’Abidjan (selon ses propres termes), toujours bien habillée, maquillée des cheveux aux orteils. Josée n’est pas aussi belle qu’elle le croit; certes elle a un certain charme, mais le pauvre a disparu sous la tonne de maquillage dont elle s’afflige dès le réveil.

Le problème de Josée c’est qu’elle ne sait pas dire NON ! Tous les garçons du quartier l’ont connu (dans le sens biblique du terme), et elle semble ne ressentir aucune gêne face aux regards posés sur elle dans le quartier. Elle s’habille de manière légère, si on peut appeler vêtements les morceaux de tissus qui couvrent à peine son corps. Toujours dehors, les boîtes de nuit, les bars et tous les maquis d’Abidjan n’ont plus de secrets pour elle.

On la voit sortir de sa maison le matin pour n’y rentrer que le lendemain aux aurores. Josée était ma meilleure amie mais nous nous sommes éloignées lorsque mes parents ont décidé que l’on déménage. J’avoue que j’ai la plus grande part de responsabilité dans cette séparation car j’ai été la première à espacer les coups de fil.

J’aime Josée mais papa ne voulait plus que je la fréquente. Il disait que « Qui s’assemble se ressemble » et il ne voulait pas que je sois comme elle. J’en voulais beaucoup à papa car selon moi j’aurais pu aider mon amie à changer. La rupture avec Josée a été effective lorsque j’ai dit à ses parents qu’elle avait des relations intimes avec l’une des terreurs du quartier. Elle m’en a voulu d’avoir causé sa rupture avec ce bandit de grand chemin qu’était feu Tino danger de mort, et a juré de se venger de moi.

Deux ans sont passés depuis notre dispute et nous avons repris contact. J’avais à présent 21 ans et j’étais fiancée à Franck. Josée le connaissait très bien car on avait déjà fait des sorties tous les trois. Elle par contre ne m’avait présentée personne depuis notre rabibochage et je me disais même qu’elle avait surement changé de vie.

*********

Aujourd’hui c’est l’anniversaire de Josée et elle organise une fête au No limit à Bassam. A la question de savoir pourquoi ne pas avoir opté pour une boîte d’Abidjan, elle a répondu qu’elle voulait fêter loin des regards indiscrets. Je me suis disputée avec Franck donc finalement j’irai avec ma copine Annie qui a une voiture. Josée m’a dit que je rencontrerai par la même occasion son nouveau copain.

La plus grande boîte de nuit de l’Afrique de l’ouest est pleine juste pour l’anniversaire de Josée la star. Son nouveau gars a dû mettre le paquet vu comment la fête est belle. Voilà Josée qui arrive. « Ah Alex, tu as pu venir ? J’ai cru qu’après ta dispute avec Franck tu n’aurais plus l’envie d’être présente.

-         Oh laisse ça! On a l’habitude, on se réconciliera dans moins de deux jours, parle moi plutôt de ton nouveau chéri, il doit être plein aux as.

-         Ca tu l’as dit. Le problème c’est qu’il est trop connu à Abidjan c’est pourquoi il a préféré que la fête soit ici. Tu dois surement le connaître, le voilà sur la piste de danse et il s’appelle Boni Ghislain.

-         JOSEE !!

-         Quoi Josée ? Je t’avais prévenue, tu pensais que j’avais oublié ma vengeance ? Quand tu m’as séparée de Tino, j’aurais aimé avoir l’un de tes frères mais ils sont aussi imbus de leur personne que toi. Je pense toutefois que je ferai une excellente belle-mère pour vous. Passe une belle soirée mon amie.


lundi 15 octobre 2012

LA NOUVELLE


Il y a quatre rangées de bancs dans ma classe comme dans toutes les autres classes de mon école. Le maître nous place selon le rang de chaque élève après la dernière composition. Ainsi, il y a la rangée des Super, la rangée des Bien, la rangée des Assez bien et la rangée des Nuls. Dès qu’une personne rentre dans la classe, elle distingue immédiatement le premier et le dernier au plus récent classement. Certains élèves ne changent jamais de rangée, mais peuvent occuper des bancs différents.

A chaque résultat c’est pareil, toute l’école assiste à la fierté des uns et à l’humiliation des autres. Elèves, enseignants et même certains parents d’élèves sont tous présents dans la grande cour de l’école pour cet examen mensuel. Dans la file d’attente, chaque élève prie pour entendre son nom parmi les premiers appelés par le maître.

Le supplice commence par les écoliers des classes préparatoires. Cette catégorie d’élèves ne comprend pas trop ce qui se passe, et devrait en principe ne pas être touchée par la sentence, mais il y a toujours dans l’assistance les déclencheurs de pleurs. En général, ce sont des redoublants qui essaient de se former une armure derrière les moqueries. Ils connaissent déjà leur sort, ils savent qu’ils occuperont la même place que les années d’avant, ils pensent à la chicotte qui les attend à la maison, alors ils se vengent en se moquant des plus petits qui découvrent les affres de l’école.

Après ces éternels redoublants, il y a plusieurs autres catégories d’élèves. Les plus nombreux sont les élèves 
moyens. Ceux là font ce qu’ils peuvent pour ne pas être en dessous de la moyenne d’admission. Certains travaillent très dur mais n’arrivent pas à sortir du lot, faire partir des privilégiés qui recevront un tableau d’honneur pendant la fête de fin d’année. Je voudrais bien vous citer tous les types d’élèves le jour du classement mais c’est au tour de notre classe de retenir l’attention de toute l’assemblée.

Le maître comme d’habitude commence par citer les noms en commençant par le plus méritant jusqu’à l’élève qui sera le plus hué par l’assistance. Au tout début l’on entend des ovations après chaque nom, puis les battements de mains se font de plus en plus rares faisant place aux moqueries du public et aux reniflements des élèves visés. Assise dans la classe je regarde les visages de chaque élève, et j’identifie déjà les réactions dans les ménages.

Prenons Marina par exemple, c’est une fille fragile, qui pleure au moindre bobo. Chaque classement représente plus qu’une torture pour elle car son père est le directeur de l’école. Elle essaie de réussir et de le rendre fier mais c’est comme si les chiffres et les lettres s’étaient liés contre elle pour l’empêcher de les retenir dans son petit cerveau en croissance. Comme toujours elle est en larmes car elle a à peine eu la moyenne à la composition, ce qui signifie une semaine sans les 500 frs pour son goûter.

Marius quant à lui, attend de recevoir son bulletin pour manifester sa joie. Il est le mathématicien de la classe mais il est nul dans toutes les autres matières. Pour lui, tant qu’il a 50/50 dans sa matière préférée le reste importe peu. Le maître a beau lui dire de faire des efforts, il se défend en soutenant qu’il aura juste besoin des maths pour gérer la boutique de son père dans quelques années. Comme d’habitude, il sera accueillit à la maison avec un cadeau s’il a maintenu son rang en mathématiques.

Puis il y a la bande de Bernardine et les jumelles. Toujours dans le top du classement, toute la classe connait leur technique pour réussir mais personne n’oserait les dénoncer. Les plus grandes tricheuses de la classe, représentent également la terreur de l’école, car elles ont eu la chance d’avoir un physique plus imposant que celui de leurs camarades.

C’est bizarre, Vanessa et ses acolytes ne pleurent pas aujourd’hui. Même Joël qui a l’habitude d’occuper le dernier rang n’a pas l’air de se soucier de ce qui pourrait lui arriver à la maison ce soir. Ils affichent tous une mine réjouie en regardant en direction de la rangée des Super. Je ne comprends pas ce qui se passe alors suivant leurs regards, je vois mon voisin en train de pleurer. Eddy, ce garçon toujours taquin, est en train de pleurnicher la tête posée sur ses deux bras croisés au dessus de la table. Je ne prêtais pas attention à lui car dès mon arrivée à l’école, j’ai été informée qu’il ne craignait jamais les résultats de composition.

Je me retourne donc vers ma voisine de derrière qui en passant a toujours eu le béguin pour Eddy. Je lui demande pourquoi est-ce qu’il pleure mais elle ne daigne même pas me répondre. Ah c’est vrai, elle ne m’adresse plus la parole parce que je ne l’ai pas aidée pendant l’épreuve de dictée. Ce n’est pas grave son voisin sera plus conciliant, je partage toujours mon pain de 10h avec lui. Il rigole longtemps avant de me répondre : « D’où tu sors toi ? Eddy c’est le premier par excellence depuis la maternelle, et toi tu apparais sur ton balai de sorcière et tu le détrônes, si tu le vois pleurer, c’est juste parce que cette fois-ci, il a été classé deuxième »

Je souris mais je sais au fond de moi, que le combat ne fait que commencer. Aucun garçon surtout s’il est doué n’apprécie de voir une fille à la tête du classement. J’ai eu la chance des nouveaux cette fois-ci mais Eddy ne se laissera pas faire, et j’ai intérêt à bien attacher ma ceinture. Pourtant je ne crains pas grand-chose, si je ne suis pas première, je serai deuxième ou alors parmi les cinq premiers du classement. Rien ne changera pour moi car depuis toute petite les bonnes notes ne me ramènent pas de cadeaux spéciaux. « Tu es intelligente donc c’est normal que tu aies de bonnes notes » me dit-on. Le drame serait que je sois un jour assise dans la rangée des Bien, alors, pour le moment peu importe mes résultats je ne crierai pas de joie mais je serai tout de même contente.

ARIANE


Ariane était une fille belle, insouciante, tête en l’air, mais gentille. Elle avait 11 ans lorsqu’il s’en est allé. Son papa, son bien aimé, le premier homme se sa vie était parti pour ce long voyage sans retour. Il était d’un caractère sévère pour cette petite fille mais il était quand même un pilier pour elle. Elle avait pleuré, crié, hurlé qu’on le lui rende en vain, personne ne semblait prêter attention à ses appels de détresse. Puis le temps avait essayé de cicatriser la plaie dans son cœur, et elle avait grandi avec sa mère, son grand frère et l’aînée de la famille.


 A 16 ans, Ariane en laissait paraître 3 de plus. Des hommes de toutes les classes sociales s’intéressaient à la petite adolescente qu’elle était encore. Livrée à elle-même, avec une mère qui était toujours restée dans l’ombre de son époux, un frère qui n’avait le temps que pour les jupons dehors, et une sœur qui gère tant bien que mal sa propre famille, Ariane ne savait à qui se confier. Puis, elle a eu les mauvaises camarades; celles que les parents n’aimeraient pas voir leurs enfants fréquenter; ces filles qui passent plus de temps dans les boîtes de nuit et maquis, qu’elles n’en passent dans les salles de classe.

Ariane contrairement à la majorité de ses amies, était vierge car malgré tout elle tenait à ce trésor. Tout d’abord, le mariage était son objectif, puis face aux réalités qui se présentaient à elle, elle s’inventait le prince charmant. Pour la jeune orpheline, elle offrirait son trésor à celui qu’elle aimerait plus que tout et dont elle serait sûre d’être l’épouse. Ariane avait des rêves, mais personne pour la guider sur le droit chemin.

Elodie, la star de l’école avait son anniversaire, elle n’avait invité que les V.I.P de l’établissement et Ariane en faisait désormais partie. Dans un maquis de la Rue Princesse de Yopougon, Ariane goûta à sa première goutte d’alcool, puis à son premier joint. Elle se sentait puissante, et à l’abri de tout. Elle oubliait le vide occasionné par le départ prématuré de son père. Elle oubliait les bagarres incessantes des amantes de son frère à la maison. Elle oubliait même que sa mère souffrait de la voir sombrer petit à petit dans les vices de l’adolescence.

Elle avait bu plus qu'elle ne devrait, et le joint n’avait pas été une bonne idée non plus, mais Ariane ne pouvait plus le savoir. Le matin à son réveil, elle n’avait plus aucun vêtement sur elle et était couchée parmi ses compagnons de la soirée. Elle se leva avec un terrible mal de tête et découvrit des traces de sang sur ses cuisses. Son entrejambe était douloureux mais elle arrivait tant bien que mal à marcher.


Ariane s’était rhabillée, et avait rejoint sa maison. Elle s’était frotté tout le corps, elle avait même failli se blesser mais elle continuait de frotter. Elle voulait se débarrasser de cette souillure mais rien, absolument rien ne viendrait replacer l’hymen où il logeait. Elle ne savait même pas qui était le responsable de cette ignominie. Sa virginité s’en est allée, comme son père l’avait fait auparavant sans qu’elle ne puisse rien y faire. Elle n’avait plus rien à perdre, mais les prochains hommes sur sa route, eux avaient tout à y perdre. Cette nuit là, elle avait aussi perdu son cœur, alors son but ultime serait de voler celui des autres, et de les réduire à néant, elle se l’était juré.

samedi 29 septembre 2012

Amour liquide



Lui, il était beau, très beau même; en fait il faisait penser à ces héros de feuilletons brésiliens que toutes les filles rêveraient d’avoir. Élancé  un teint noir capable de rendre jalouse une forêt entière d’ébènes, des yeux noisette ornés de cils tant recherchés par la gente féminine à travers toute sorte d’artifices; il aurait pu avoir sa photo à côté de la définition du mot beauté dans le dictionnaire. Son sourire était digne d’une publicité de dentifrice tant ses dents étaient d’un blanc éclatant; sa carrure de mannequin n’était pas non plus étrangère au charme qu’il exerçait sur le sexe opposé. Le seul inconvénient pour Didier était sa pauvreté.

Didier avait eu le malheur de naître dans une famille démunie, de père ouvrier et de mère ménagère. Avec cinq frères et sœurs, dans une bicoque à Mossikro, la vie n’est pas du tout facile. Le bac en poche, Didier n’a pas eu la chance de continuer les études malgré un cursus scolaire très brillant. Une maladie surement lancée par les sorciers du village l’a terrassé tout le long de l’année scolaire de terminale; il a pu décrocher son bac scientifique mais avec une mention passable qui ne lui assurait pas l’obtention d’une bourse d’étude pour l’étranger. La crise postélectorale avec son lot de désastres,  l’université a été fermée alors qu’il était en première année en faculté d’histoire géographie. 

Après de longs essais infructueux pour réussir à un concours ou avoir un petit boulot qui pourrait lui assurer son argent de poche, Didier a finalement décidé d’user de son charme. Plusieurs femmes d’âge mûr lui avait proposé du travail en échange de rapports entretenus mais, lui ne se voyait pas du tout sortir avec une femme qui pourrait le mettre au monde. Non, lui il avait une bien meilleure idée, et il lui fallait juste deux ou trois beaux ensembles, un peu d’argent pour le transport et une seule journée pour réaliser son plan « Fils de pauvre en détresse ».

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Elle était d’une beauté quelconque, rien d’extraordinaire qui devrait être détaillé. De taille, et  de forme moyennes, Elodie était la fille du ministre de l’urbanisme et son père cédait à tous ses caprices; du shopping à Paris jusqu’aux concerts à Londres, tout était à sa disposition. Elle venait de décrocher le bac et profitait à fond de ses vacances avant de partir continuer ses études à Georgia States University. Les glaces ont toujours représentées le péché mignon d’Elodie, et elle ne ratait aucune occasion d’en profiter avec sa meilleure amie. 

Nice Cream, glacier de tous les chocos d’Abidjan, cadre enchanteur accompagné de glaces toutes aussi délicieuses les unes que les autres, était le lieu choisi par Didier pour trouver sa future financière. Il a fallu que ce jour là Elodie y soit avec sa meilleure amie Anne, qui, plutôt issue d’un milieu modeste, était la fille du chauffeur personnel de la princesse. Anne connaissait le mauvais caractère de son amie mais elle savait aussi, que cette dernière manquait d’affection, entre une mère décédée, un père comblant son absence par des cadeaux et des amies arrivistes. Elodie n’avait jamais su ce qu’était l’amour.

L’entrée de Didier dans le glacier n’était pas passée inaperçue car presque toutes les femmes et même les hommes présents se retournaient pour l’admirer. Accompagné de Franck son meilleur ami, ils se dirigèrent directement vers le comptoir et s’installèrent cinq minutes plus tard avec leur commande. En apercevant, les deux filles assises au fond de la salle, Didier ne pensait plus à l’objectif qui l’avait guidé en Zone 4, mais plutôt à ce visage rayonnant qui illuminait la pièce. Cupidon l’avait frappé avec une pluie de flèches et il était tombé amoureux de cette fille, il le savait déjà.

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Deux semaines étaient passées, et Elodie ne parlait plus à Anne à cause de ce beau jeune homme de Nice Cream qui avait eu l’audace de porter ses yeux sur la pauvre plutôt que sur la fille du ministre. La jalousie est une bien mauvaise conseillère et Anne payait les frais de ce sentiment dévastateur. Combien de fois avait-elle été insultée par ses filles sorties de nulle part qui se faisaient appelées amies d’Elodie ? Elle en avait marre de ces injures et de toutes les menaces dont elle faisait l’objet, elle décida de ne plus répondre ni aux appels, ni aux invitations de Didier.

Didier avait oublié son plan « fils de pauvre en détresse ». L’élue de son cœur était pauvre comme lui, enfin, moins que lui mais n’empêche que pour elle il était plein de bonnes résolutions. Il a compris qu’il ne pourrait être avec elle à cause de cette fille pourrie gâtée de riche qui se croit tout permis. Didier avait pris sa décision, si c’est lui qu’elle voulait, alors elle l’aurait et sur un plateau d’argent même. La cour qu’il lui fit ne dura pas plus de deux jours qu’ils partageaient déjà le même lit.

Un mois plus tard, Didier avait plus de dix millions sur son compte d’épargne, et ses parents avaient déménagé dans un autre quartier de Yopougon bien plus agréable pour élever leur progéniture. Évidemment, ils pensaient que leur fils avait trouvé un travail car jamais, ils n’auraient pu imaginer que Didier pouvait inscrire le montant qu’il voulait sur les chèques d’un ministre de l’Etat. Didier avait renoué avec Anne mais bien sur ils vivaient leur amour en secret, bien loin des regards indiscrets. Anne savait très bien d’où venait l’argent de Didier mais bientôt elle n’aurait plus à s’en soucier, aussi elle acceptait cette relation cachée sans se plaindre.

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Elodie a réussit à avoir la clé du coffre fort de Monsieur le Ministre de l’urbanisme. En l’ouvrant, elle n’en revenait pas, son père cachait plus d’un milliard dans son coffre car, avec la situation du pays, disait-il, il faut avoir du liquide à portée de main. Du liquide, elle en avait, et elle en donnerait volontiers à son amour Didier pour qui elle était prête à tout. Dans la nouvelle voiture qu’il venait d’acheter, Didier a chargé dix valises remplies de billets de banque. Quelques bisous à sa financière et il rentra chez lui retrouver sa famille et sa fiancée. 

Tout se passa rapidement, quelques salutations échangées avec papa et maman, un bisou à Anne sa chérie, un jus d’orange pressé déversé dans la gorge et Didier était allé se coucher. Anne rentra deux minutes dans la chambre et informa ses futurs beaux parents qu’elle partait faire une course rapide avec la voiture de Didier. A son réveil, Didier ne s’inquiétait pas de ne pas voir sa fiancée, sa mère lui a dit qu’elle était allée voir sa mère malade à l’hôpital et qu’elle avait utilisé sa voiture. Il était vingt trois heures lorsque Didier aperçut ce maudit bout de papier qu’il avait pris au départ pour un ticket de caisse. Pas grand-chose n’y était écrit : « Elodie t’a financé, merci de m’avoir financée à ton tour, je suis loin ne me cherche plus. »

Elodie avait reçu un message de son amie d’antan : « Merci Elo pour les sept cent millions que tu m’as offerte, je doute fort que ton père apprécie ce geste si généreux de ta part, quant à moi je suis déjà dans mon avion et on ne se reverra surement pas de sitôt ». Didier ne décrocha pas son téléphone malgré les nombreuses tentatives d’Elodie pour le joindre. Le ministre de l’urbanisme appela sa fille, elle devait se rendre à l’aéroport avec le chauffeur car la situation du pays empirait. Elodie se rendit donc aux Etats Unis chez l’une de ses tantes paternelles.
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 Les banques sont fermées, les comptes des ministres sont gelés, le Ministre de l’urbanisme n’est pas inquiet, il a assez d’argent dans son coffre fort, mais déception, arrêt cardiaque immédiat, le coffre est vide.