Je me suis toujours vanté d’avoir épousé la plus belle femme au monde. La
beauté est relative mais celle de Rigo met tout le monde d’accord. D’ailleurs,
comment ses parents ont pu donner Rigobertine comme prénom à une aussi belle
princesse. La première fois qu’elle m'a dit comment elle s'appelait, j’ai cru à
une farce ; mais non c'est bien son unique prénom. En même temps, ses
parents villageois n’ont pas vraiment de goût hormis pour la procréation. Tous
leurs 5 enfants, filles comme garçons sont des pures merveilles, toutefois,
Rigo demeure la plus belle de la famille.
Trêve de bavardages, j’ai rencontré Rigo il y a cinq ans lors de
funérailles dans mon village. J’ai longtemps hésité avant d’assister à
l’enterrement de cet oncle plus avare qu’Harpagon lui-même. Cependant,
mon voyage a été récompensé par la découverte de cette perle rare. Cadre,
élégant, mais surtout citadin, je n’ai pas eu de mal à la conquérir. Je me
considère chanceux qu’un autre énergumène ne soit passé avant moi et n’ait volé
le cœur de ma dulcinée. Quoi qu’il en soit, Rigo m’appartient et je n’aime pas
qu’on pose le regard sur elle.
Pour épouser mon amour je n’ai pas eu à faire de grandes dépenses car sa
famille a voulu quelque chose de simple. Je n’ai plus aucun proche parent après
mon avare d’oncle et sa famille a tenu à ce que le mariage coutumier se fasse
dans la stricte intimité. Cela faisait des années que je n’avais pas été au
village alors j’ai bien aimé l’idée d’une cérémonie sans tapage. Seul mon
meilleur ami Kévin m’a accompagné pour me servir de témoin. Un adjoint au maire
a effectué le déplacement à mon domicile en ville pour la cérémonie
civile et j’étais officiellement l’homme le plus heureux de la planète.
En plus d’être belle, Rigo est gentille, douce, aimante, soumise,
accueillante. Je ne lui ai trouvé aucun défaut durant toutes ces cinq années
passées ensemble. La seule chose qui me tracassait était l’absence de rires
d’enfants dans notre grande villa. Cinq ans, sans la moindre grossesse, le
moindre retard dans les menstrues, rien, absolument rien. Pourtant nos examens
ne révèlent aucune anormalité chez l’un comme chez l’autre.
Hier Kévin m’a appelé au milieu de nuit, disant qu’il a quelque chose de
très important à me raconter. J’étais tellement exténué par ma journée de
boulot que je n’ai rien compris à ce qu’il racontait. Ce matin j’ai découvert
une lettre de Rigo à mon chevet.
« Roger je t’abandonne parce que Kévin va détruire ce que j’ai mis
cinq ans à construire. Je t’ai aimé et je t’aimerai surement encore mais il est
mieux pour moi que je parte. Je savais que cela arriverait un jour car ma
beauté est une malédiction pour moi. Adieu »
Kévin a donc osé faire ça, courtiser ma femme ? Ma femme ? Il
était pourtant plus qu’un ami, un frère. Il entra dans le salon, son journal à
la main comme d’habitude. « Roger je n’arrive toujours pas à croire à ce
qui nous ai t’arrivé.
- Moi non plus mais bon, qui ne serait pas
tenté par cette beauté ? Je suis déçu mais je surmonterai ma douleur. Toi
par contre tu n’auras pas le temps de sentir la tienne.
PAN ! le révolver
que j’ai acheté avec Kévin il y a de cela quelques années a servi a tué son
ancien propriétaire. Il eut juste le temps de me montrer l’une des pages du
journal où figurait la photo de Rigobertine et de toute sa famille.
En commentaire j’ai pu
lire : « Morts il y a plus de dix ans, les membres de la famille Tapé
continuent de charmer les vivants grâce à leurs beautés légendaires. Ils se
marient, ne font pas d’enfants puis disparaissent quand leur secret
est découvert, faisant sombrer leurs conjoints dans la folie. Ils se vengent
ainsi, de plusieurs trahisons amoureuses. Leur beauté leur aurait joué un sale
tour ».
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