samedi 5 décembre 2015

Sandy la catastrophe...3


Illustration par Tatou Dembele

La douceur de la voix le surprit, autant que ce qu’il avait sous les yeux. Il voyait un superbe corps qui n’avait rien à envier aux pom pom girls du campus. Il s’attendait à revoir un sexe masculin en lieu et place de l’appareil génital féminin comme il y avait de cela trois années. Mais au lieu de ça, ce qu’il aperçut eut le don d’éveiller en lui un sentiment de désir inapproprié compte tenu de la situation. Que s’était-il passé ? Comment cela se faisait-il qu’elle était devenue « normale » ? Évidemment il n’y avait rien de normal au fait qu’elle soit en train de préparer sa mort, mais physiquement, elle n’aurait pas du être ainsi constituée.

- Tu t’es fait opérer ? Demanda-t-il avec un mélange de surprise, de peur et de désir dans la voix.
- Oui. Je me suis fait enlever ce sexe qui faisait de moi la risée du campus. J’ai enlevé ce truc qui m’a empêché d’avoir une vie normale pendant de nombreuses années. Et à présent j’ai l’intention de te débarrasser du tien également.

Ryan ne sut plus quoi répondre. Son sort avait l’air d’être déjà scellé. Pourquoi n’avait-il pas quitté la ville quand cette folie meurtrière avait débuté ? Il avait refusé de croire au début, lorsque Brice avait été retrouvé mort et émasculé, que cela avait quelque chose à voir avec cet incident trois années en arrière. Mais en voyant chacun de ses compagnons disparaitre au fur et à mesure, il avait pris conscience du danger qui planait sur sa vie. Et pourtant il ne s’était pas résolu à s’enfuir. Il s’en était voulu aussitôt qu’il avait commis sa bêtise et avait passé les dernières années à chercher un moyen de se faire pardonner. Il savait que rien n’aurait pu effacer ce qu’ils avaient fait. Mais lorsque Sandy s’était enfuie de l’université, il avait arrêté de trainer avec ses pseudos amis. Il avait compris qu’il ne servait à rien de chercher à leur plaire s’il fallait pour cela blesser des gens sur le chemin. C’était vrai que le manque d’un cocon familial le poussait à chercher sans cesse la compagnie des autres et à se faire accepter. Orphelin et balancé de familles d’accueil en orphelinats, il pensait que réussir à intégrer un groupe d’étudiants branchés lui aurait apporté l’amour dont sa famille biologique et les autres ayant suivi avaient refusé de le gratifier. Mais en voyant l’horreur dans les yeux de Sandy quand il lui arrachait ses vêtements, en voyant les larmes ruisseler sur son visage en découvrant ses photos placardées sur les murs du campus, il avait compris qu’il avait emprunté un mauvais chemin. Il repensait encore au passé lorsqu’il sentit une douleur fulgurante lui traverser la poitrine.

Sandy avait enfoncé à nouveau la lame de son couteau dans l’incision qu’elle avait déjà faite. Elle avait préparé un véritable plan de torture mais à présent elle se demandait si elle irait jusqu’au bout. Que ferait-elle après ce dernier meurtre ? Elle se dit qu’elle aurait peut-être dû faire durer son supplice en le laissant errer dans la ville se demandant quand elle se déciderait à agir. Mais elle se rappela qu’elle aurait pu perdre ses traces si elle avait attendu trop longtemps. Elle s’était préparée pour accomplir sa vengeance durant les derniers mois et elle se rendit compte qu’elle n’avait aucune idée de ce que serait sa vie lorsqu’elle en aurait fini avec Ryan. Grâce à son opération elle aurait pu avoir une vie « normale » dans un autre endroit. Quitter cette ville qui ne lui avait rien apporté de bon lui aurait fait beaucoup de bien. Mais les enquêtes faisaient d’elle le suspect numéro un. Les policiers avaient réussi à établir un rapport entre cette étudiante hermaphrodite qui avait été humiliée quelques années plus tôt et les meurtres qui avaient eu lieu dernièrement. On la surveillait comme du lait sur le feu et elle s’étonna encore qu’elle ait pu échapper aux inspecteurs qui lui collaient aux fesses pour s’occuper de Ryan. Elle avait interdiction de quitter le territoire et une tentative de quitter l’Etat par les airs se solderait forcement en un échec. Elle soupira et se demanda pourquoi est-ce qu’elle était envahie par toutes ces pensées alors que se trouvait devant elle un homme qui ne demandait qu’à se voir arracher le souffle de vie.

Il fut surpris de la voir se rhabiller, mais encore plus lorsqu’il sentit ses lèvres sur les siennes.

- Tu sais avant ce jour-là, j’avais le béguin pour toi. Ce que tu m’as fait m’a profondément blessée, d’autant plus que je te croyais mon ami.
- Je le sais, répondit-il. J’ai commis une erreur. J’ai voulu être cool et accepté par les autres mais je sais que je n’aurais jamais dû faire ça.
- J’espère que tu ne penses pas que cela effacera ce que tu as fait.
- Non. Je sais déjà que tu as décidé de mon sort. Je sais que tu me tueras peu importe ce que je pourrai dire. Mais je tenais juste à te dire encore une fois que pas une nuit ne s’est passée sans que je n’en fasse des cauchemars.

Sandy laissa éclater un rire cynique qui contrastait avec sa beauté et la douceur de sa voix.

- C’est moi qui suis agressée et c’est toi qui en fais des cauchemars. Elle est bien bonne celle-là. As-tu une idée de ce que j’ai l’intention de te faire ?
- Me tuer je devine, comme avec les autres.
- Oui, mais pas d’une mort douce. J’ai l’intention de prendre mon temps pour te faire sentir la douleur que tu m’as infligée.

Illustration par Saraï D'Hologne

Tandis qu’elle parlait, Sandy s’était éloignée de lui. Mais à présent elle avançait d’une démarche féline, telle une prédatrice à l’affut de sa proie. Elle lui empoigna les testicules de façon violente et y appliqua la lame mal aiguisée de son deuxième couteau. Ryan hurla de douleur tandis que ses appareils reproducteurs le quittaient progressivement. A-t-on idée de faire souffrir ainsi un être humain ? Il n’y avait que dans les films que ce genre de choses arrivait. Sandy se rendit compte que la tache devenait difficile et qu’elle perdrait trop de temps. Les cris de Ryan la touchaient au plus profond d’elle. Elle se sentait affectée et s’en voulut d’avoir pitié de lui. Il ne méritait en aucun cas sa pitié étant donné qu’il ne l’avait pas épargnée elle. Elle lâcha le couteau qu’elle utilisait et pris l’autre à la lame plus tranchante. De façon abrupte elle coupa les morceaux de chair qu’elle tenait entre les mains. Ryan perdait beaucoup de sang et pour éviter qu’il ne tombe en syncope, elle lui administra rapidement un coagulant pour stopper l’hémorragie et la morphine qu’elle avait préparé pour atténuer la douleur. Pourtant, il perdit quand même connaissance avant qu’elle commence à lui perfuser une poche de sang. Elle n’avait aucune envie qu’il meurt maintenant. Il était sa dernière victime et elle comptait bien en profiter longtemps avant que la police ne l’arrête, qu’elle ne se tue, ou qu’elle réussisse à s’enfuir hors du pays… Fin

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