« J’arrête quand je veux ». Elle le disait à ceux qui voulaient l’aider. D’autres avant elle l’ont dit aussi. Elle se croyait spéciale. Elle n’était pas une exception. Ses bains se firent rares. Elle peinait à se nourrir correctement. Son boulot ? Elle l’avait oublié depuis belle lurette. De toutes les façons ils ne voulaient plus d’elle. Ni ses patrons. Ni ses amis. Ni lui, son amoureux. Son Jordan. Avant elle était propre et belle. Il l’aimait. Son Jordan aux yeux rieurs. Son Jordan au corps d’Hercule. Il a tenté de l’aider. Face à son rejet, il est parti. Ce fut ensuite son appart. Comme tout le reste, sa vie défila sous ses yeux. Ses rêves s’envolèrent sans elle. Aujourd’hui elle n’est plus propre. Sous ses haillons, j’imagine qu’elle est toujours belle. En dessous de cette crasse, il y a surement une lumière. Je n’en saurai jamais rien. Elle tire un nouveau coup sur sa pipe. Je me dépêche de m’éloigner. Elle ne m’inspire pas de dégout. Enfin, j’essaie de me convaincre que la puanteur qu’elle dégage ne me révulse pas. J’essaie de me convaincre que je ne suis pas comme les autres. Que je suis différente de ceux qui changent de chemin en la voyant. Je prétends que je crains juste une brusque réaction de sa part. Je prétends craindre une crise d’asthme en respirant la fumée qu’elle expire. Je me mens à moi-même. Comme les autres je m’éloigne. Je ne lui donnerai pas l’occasion de raconter son histoire. De loin, je lui invente une vie.
jeudi 30 juin 2016
Une ombre dans le parc...
jeudi 2 juin 2016
Mes belles imperfections
Ça fait plus d'une heure que je me tiens devant le miroir. L'image que la glace me reflète me plaît. Tout est parfaitement dessiné. Je n'ai rien à envier à Beyonce et Rihanna. Et je ne leur envie rien. Je me tiens toute nue et j'admire chaque partie de mon corps. Derrière je peux voir mon mari. Il se retourne encore dans les draps. La nuit dernière n'a pas été de tout repos. Tous les endroits de la maison ont été visités. Malgré tout ce sport nocturne, je me suis levée de bonne heure. Comme tous les jours depuis que je suis mariée. Je souris en pensant à ma première rencontre avec Emmanuel. C'était la première fois que je le voyais. Mais lui m'avait déjà remarqué depuis bien longtemps. Il m’a adressé la parole après une réunion du club de business. Nous sommes d'abord devenus amis. Jamais il n'a eu un geste déplacé, un mot à l’envers. J'étais donc à mille lieues d'imaginer ses sentiments. Nous étions tous les deux étudiants à l'Université Internationale de Grand Bassam. Il entra dans ma chambre un soir. Il était presque l'heure du couvre-feu. Tous les garçons étaient partis dans leur résidence. Sa mine témoignait de son embarras. "Sabine j'ai quelque chose à te dire." C'était la première fois que je le voyais ainsi. Ses mains tremblaient et ses yeux étaient baissés. Je ne répondis pas. J'attendais qu'il continue de lui-même.
- Tu sais que je pars à Atlanta dans deux semaines.
- Ah oui je sais. Tu n'as pas besoin de faire toute une cérémonie pour ça.
- Tu m'as dit que toi tu irais à Mankato. Ce qui veut dire qu'on ne sera plus ensemble.
- Tu aimes ça hein! Il y a Skype, WhatsApp, Viber etc. On sera toujours amis. Personne ne te remplacera.
- Justement je ne veux plus qu'on soit amis.
-Ayi! Tu as quel problème ?
-Je te trouve belle ah! Depuis je parle, je baisse la tête, tu ne peux pas lire entre les lignes? A chaque réunion j’ai les yeux braqués sur toi. Lorsque tu te tiens debout au milieu des autres, je ne vois que toi. Lorsque je me tiens devant tout le monde, c’est pour toi et uniquement toi. Je me mets en valeur pour que tu me voies. Je suis fan de toi! Non je t'aime. Si je dis fan seulement tu ne vas pas comprendre. Bon je m'en vais ils vont fermer les portes.
Debout devant le miroir, je regarde mes bras. Autrefois je les trouvais difformes. Je les trouvais trop gros par rapport à mon tronc. Je trouvais mes fesses trop plates. Et mon visage ? N'en parlons pas. Ces lèvres qu'aujourd'hui j'appelle voluptueuses, je les traitais de volumineuses. Emmanuel m'a aidé à avoir un autre regard sur mon corps. Il m'a appris à aimer ce corps que je rejetais. Oh j'en ai entendu plein dire qu'il faut s'aimer soi-même. Ils disent qu'on ne doit pas attendre quelqu'un pour nous dire qu'on est belle. C'est vrai. Mais c'est toujours un plaisir d'entendre mon chéri me dire à quel point je suis magnifique. Quand je me tiens devant la glace, je ne vois plus une jeune fille petite et rondouillette. Je vois une femme de taille moyenne avec des rondeurs. Je vois une femme belle, intelligente et amoureuse. Quand Emmanuel me regarde comme il le fait actuellement du lit, je n'envie aucunement Beyonce ou Rihanna. Je me glisse dans les draps à ses côtés et je respire son odeur de mâle. Et pour ceux qui pensent que je ne me trouverai plus belle s'il me quitte, vous vous trompez. Il m'a appris à aimer mais surtout à m'aimer avec ou sans lui.
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