Pendant les 18 derniers mois, c’est avec envie que j’observais
derrière mon écran tous les évènements culturels et artistiques qui se passaient à Abidjan. C’est donc sans hésitation
que j’ai décidé d’assister à la première édition de Voyelles…
Voyelles est un atelier littéraire initié par Stella Sanogoh et inspiré par les ateliers d’écriture qui étaient offerts par l’Association des Écrivains de Côte d’Ivoire (AECI). Amoureuse des mots, Stella veut permettre à des écrivains amateurs et confirmés de se retrouver chaque mois pour échanger autour de la littérature tout en apprenant à mieux écrire.
Arrivée sur les lieux entre 14h30 et 14h35, je fus surprise de n’y
rencontrer que l’hôtesse du jour avant de voir arriver plus tard deux écrivains
slammeurs que j’avais entraperçu dans la cour de l’ancienne mairie de Cocody.
Faible promotion, heure africaine ou manque d’intérêt? Je n’arrivais pas à
expliquer pourquoi jusqu’à 15h, la salle ne soit animée que par quatre ou cinq âmes
-outre les tableaux pleins de vie de la salle du musée- alors que l’évènement était
prévu pour 14h30. Peut-être étaient-ils tous à Heden Golf Hôtel pour voir les
Twins ? Je commençais à être déçue mais le sourire rayonnant de l’hôtesse
me donnait de l’espoir chaque fois que je levais le nez de ma lecture...
Finalement c'est à 15h20, qu'on aborda le sujet du
jour: Littérature Africaine Francophone dans le monde, quel impact ? Je crois que l'on a surtout évoqué les
raisons pour lesquelles les écrivains de l’Afrique noire francophone ne percent
pas autant que leurs confrères anglophones et maghrébins et comment y remédier. En fin de compte, je n’ai pas regretté d’avoir pris part à cet
atelier car j’ai appris beaucoup de choses.
Des interventions des uns et des autres -incluant les retardataires-, j’ai
retenu que la littérature africaine noire francophone après 50 ans d’indépendance
est encore à la traîne dans l’industrie. À ceux qui seraient prêts à crier
que les Africains et les ivoiriens en particulier n’aiment pas lire, Sergeph
écrivain, slammeur et co-animateur du jour répondit que les ivoiriens aiment
lire mais ils n’aiment pas lire ce que nous voulons qu’ils lisent. Il rappela
que le journal le plus lu en Côte d’Ivoire est l’hebdomadaire humoristique
Gbich et que les petits journaux racontant des histoires quotidiennes et vraies
(?) vendus à 100 francs l’unité s’arrachent comme des petits pains dans les
quartiers populaires. Pour les avoir moi-même dévorés quand j’étais au lycée, j’avoue
que ces petites histoires faciles à lire en attirent plus d’un. Sergeph pense
donc que lorsque l’écrivain choisit une certaine audience, c’est à lui d’assumer
son choix plutôt que d’espérer changer les goûts des lecteurs.
L’inaccessibilité du livre, le manque de promotion par les maisons d’édition,
le faible appui par les autorités compétentes et le désintérêt pour la littérature dite
lettrée sont quelques raisons évoquées pour expliquer les difficultés que
rencontrent les écrivains de l’Afrique noire francophone. Mais que faire ? Cédric Marshall, jeune écrivain suggéra que l’amour pour la littérature soit inculquée
dès le bas âge dans nos écoles et à la maison. En effet il est plus facile d’apprendre
aux enfants l’importance de la lecture que d’essayer plus tard d’en convaincre
un adulte.
Pour l’auteur du livre Le péché, Seydou Koné, il faut rendre le livre accessible à tout le monde en
installant des bibliothèques dans plusieurs villes et communes. Il pense également
que des partenariats entre diverses maisons d’édition contribueraient sans doute
à faire traduire les livres dans différentes langues et à les promouvoir
globalement. Stella Sanogoh quant à elle pense que les écrivains doivent être
des catalyseurs, des inventeurs d’âmes. Il ne faut pas écrire uniquement pour
devenir célèbre ou riche mais écrire pour transmettre de l’émotion, un peu de
soi. Elle blâme donc les écrivains -en prenant son propre exemple-, qui écrivent
rapidement, animés par la fougue de publier une première œuvre ou même
plusieurs sans essayer de construire un véritable chef d’œuvre. De chercher des
tournures compliquées pour dire des choses simples... De plus selon elle, même si
les maisons d’édition locales ne sont pas exactement à la hauteur de nos
attentes, c’est à l’écrivain de se vendre lui-même. Avec aujourd’hui la versions électronique des livres, chaque écrivain peut lui-même vendre ses œuvres
sur internet et partout dans le monde.
Le président de l’AECI Josué Guébo rejoint Stella en clamant qu’il ne faut pas se contenter d’écrire pour les locaux. Un écrivain
selon lui, doit avoir de l’audace et l’ambition de conquérir le monde. De ce
fait, il ne doit pas se contenter des éditions locales. L’écrivain doit avoir une
perspective universelle et cela implique en dehors même des écrits, d’être prêt
à collaborer avec des maisons d’édition étrangères. Enfin, plus d’un ont souligné l’importance
des prix littéraires qui permettent de faire connaître les auteurs, de leur
accorder un crédit à la fois au niveau national et international et de booster
les ventes.
Après ce partage et parce que les voyelles font chanter les mots, nous nous
sommes retrouvés autour de la table d’écriture et chacun d’entre nous a abordé
le thème de son choix. Les 4 thèmes étaient :
-
Je
me souviens
-
Lumière
-
La
description d’un paysage vu par un oiseau sans mentionner l’oiseau.
- La description d’un paysage tel que vu par une femme âgée dont le vieux et détestable mari vient juste de mourir. On ne doit pas mentionner ni le mari ni la mort.
Vous aussi derrière vos écrans vous pouvez vous y essayer en quinze minutes.
Top c’est parti !
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