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Illustration par HStudio'S |
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Je
t’aime
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Qu’est ce que tu as dis?
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Je t’aime
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Pourquoi ? lui demandai-je
L’homme sous mes yeux, celui qui me prononçait enfin ces trois mots était
celui que j’avais longtemps attendu. Combien de nuits avais-je passées à me
demander s’il finirait un jour par me chanter l’hymne de l’amour ? Il
s’était enfin décidé à sauter le pas et pourtant… « Pourquoi ? »
c’est tout ce que j’ai pu répondre alors que j’avais enfin ce que j’avais tant espéré
entendre. Il était beau dans sa chemise pagne mal boutonnée. Ces lèvres qui
venaient de prononcer la formule magique invitaient à toutes sortes de délices.
Il était majestueux avec sa barbe taillée en couronne. Il sentait bon comme à
son habitude, mais tout était différent ce jour-là.
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Je t’aime parce que tu ne te contentes pas d’être belle
mais nous fait également l’affront d’être intelligente. Je t’aime parce que
derrière cette façade de dure à cuire que tu t’es construite, j’ai pu
apercevoir le cœur tendre que tu protégeais. Je peux dire que je t’aime parce
qu’au fond je n’espère pas entendre une autre voix que la tienne chaque fois
que je me réveillerai. Je ne dis pas que tu as une belle voix et d’ailleurs
personne ne me croirait de toutes les façons. L’amour rend aveugle mais il ne
m’a pas rendu sourd… C’est pourtant cette voix rocailleuse que j’aimerais avoir
comme berceuse chaque fois que je m’endormirai. Je t’aime parce que tu es celle
que mon cœur a choisie comme guide. Je pourrais tenter d’énumérer des centaines
de raisons mais ce serait faire mentir celui qui a dit que le cœur a ses
raisons que la raison elle-même ignore. Chigata je t’aime tout simplement parce
que tu es toi et tant qu’il y a de la vie, c’est avec toi que je veux passer le
restant de mes jours.
Sept fois, c’est le nombre exact de fois qu’il a dit qu’il m’aimait en ce
jour. Sept fois c’est le nombre de fois exact que je lui ai dit que
je l’aimais auparavant. Je me souvenais particulièrement de la première
fois. J’avais les lèvres qui tremblaient, le cœur qui battait à tout rompre,
les mains moites et le sang qui circulait à vive allure dans mes veines. Il
avait remarqué que quelque chose changeait. Il savait surement ce que je
ressentais avant même que mes lèvres ne s’ouvrent et pourtant il avait laissé
faire. Il aurait pu et aurait dû m’empêcher de franchir le cap mais il est
resté stoïque pendant que je me débattais avec ces trois mots qui une fois
réunis auraient pu exprimer mes sentiments. Je savais que je n’aurais rien en
retour mais j’ai quand même tenté ma chance. Je me suis sentie vulnérable ensuite
et pourtant, j’ai continué à lui prononcer cette phrase en espérant qu’un jour
je l’entende à mon tour. Sept « je t’aime » plus tard, ce jour était
enfin arrivé. À un moment où je n’en rêvais plus, quand je ne l’attendais pas.
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Kanigui,
tu as comblé un vide dans ma vie. Kanigui, lorsque je t’ai connu j’étais brisée
mais tu m’as aidée à me reconstruire. Tu m’as apprise de nombreuses choses dont
la plus importante est que j’ai de la valeur. J’ai appris à te connaitre et
j’ai appris à t’apprécier. Il fut un jour où j’ai fini par lâcher un « je
t’aime » difficilement audible et pourtant en provenance du plus profond
de mes entrailles. Ce « je t’aime » des mois plus tard est demeuré
sans échos et a fini par s’éteindre aussi silencieusement qu’il avait été
prononcé. Je dirai que j’ai insisté tu diras que ce n’était pas assez. Je dirai
que tu n’as pas essayé mais j’aurai encore tort comme à chaque fois que tu fais
usage de ton talent d’orateur. Quand les choses doivent se faire
difficilement ; quand une relation humaine nécessite que l’on fasse des
efforts surhumains, alors il est temps de se poser les vraies questions.
Kanigui, les choses que l’on met longtemps à croire sont celles qui font
mal à croire. J’ai mis du temps à l’accepter. Mais j’ai fini par me faire une
raison. J’ai fini par comprendre que même si je t’aimais, nous n’étions pas
forcément faits l’un pour l’autre. Et aujourd’hui Kanigui, tu dis que tu
m’aimes…
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Je
ne le dis pas seulement Chigata. Je le pense et le ressens dans chacune des
fibres de mon corps. Ce n’est pas que de l’amour Chigata. Et ce n’est pas pour
rien que tes parents t’ont ainsi nommée. Chigata tu es ma vie. Tu es mon rayon
de soleil. J’ai mis du temps à m’en rendre compte mais Chigata tant qu’il y a
la vie, l’amour est permis.
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Kanigui
on dit plutôt que tant qu’il y a de la vie il y a de l’espoir. Mais aujourd’hui
je ne te donnerai pas l’occasion d’étaler tes longs discours. Tu as eu
l’occasion de me chanter ton amour mais tu as maintes fois fui l’engagement. Je
t’ai aimé certes mais à présent mon cœur appartient à un autre. Tu te souviens
de ces scènes de film que je trouvais tellement romantiques ? Ce moment où
un certain amoureux venait déclarer sa flamme à l’élue de son cœur justement
lorsque cette dernière s’apprêtait à épouser un autre devant l’autel ? Cet
acte que je prenais à l’époque pour une preuve d’amour n’est que la
manifestation d’une lâcheté qui tait son nom mais surtout d’un pur égoïsme. Kanigui, tu as creusé un trou plus béant que
le vide que tu avais comblé auparavant. Mais tu vois cet homme à mes côtés ?
Celui que je m’apprête à épouser ? Il a utilisé cette anfractuosité pour
installer les fondations de son château. Dorénavant c’est lui le roi de mon
cœur alors je te prie de t’en aller afin que nous puissions continuer notre cérémonie.
Monsieur le maire je vous prie de ne pas considérer cet incident. Personne ne
s’oppose à ce mariage et quand bien même une armée entière d’opposants se
présenterait, cette union sera scellée.
Je ne pris pas la peine de le voir quitter la salle de mariage de l’hôtel
de ville. J’ai aimé Kanigui mais à présent ma vie c’est Namogo.
Sens des prénoms
(senoufos) en français :
Chigata : Tant qu’il y a la vie.
Kanigui : Encore un autre, encore un autre garçon. Ce prénom se donne au 3e ou 4e garçon consécutif d’une mère.
Namogo : Le
garçon a duré. Lorsqu’une femme ne met que des filles au monde, son premier
garçon est ainsi nommé.
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